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PROMO 62

Livre d'or
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section Caire

Alain Caire

La crue de la Seine (1995-1999)

Lors de mon arrivée à la tête du département « Environnement et Sécurité » de la RATP, le 1er janvier 1995, j’héritai, entre autres responsabilités, de la mission Défense, alors dirigée par un de nos grands anciens, Jacques Favreul, avec qui j’avais toujours eu de bonnes relations. Il avait dû quitter la Marine pour des raisons familiales de santé affectant tragiquement plusieurs de ses enfants. Pas forcément à l’aise dans le milieu de l’entreprise RATP où l’environnement syndical était à la fois nouveau pour lui et assez spécifique, il avait finalement été désigné à la tête de cette mission défense où il s’efforçait de faire passer des messages  clairs, mais pas forcément entendus. Dans le cadre des exercices de défense que, chaque année, la préfecture de police organisait (le préfet de police dirige la zone de défense de Paris), il était prévu, sur la proposition de Jacques Favreul, la simulation d’une crue de la Seine du type 1910.

En effet, la construction du tunnel entre Luxembourg et Chatelet notamment,  comme d’autres extensions du réseau métro, mettaient physiquement en connexion avec la ligne C du RER entre Austerlitz et Invalides, une bonne partie des tunnels du métro et du RER. Le risque de voir submergés 110 km de lignes souterraines de la RATP, sans compter celles de la SNCF, était patent.

L’attentat de Saint Michel, en juillet 1995, allait avoir pour conséquence de remettre aux calendes grecques le thème d’exercice prévu. J’avais la chance d’être lié d’amitié avec le Préfet de Police de l’époque, Philippe Massoni, dont l’épouse avait suivi comme Alain Béreau, Gilles Combarieu et moi la 40e session de l’IHEDN en 1987-1988 (et oui … nous nous étions retrouvés ensemble, tous les trois issus du binôme des postes 23-24 à La Baille). Grâce à la confiance qu’il m’accordait, je fus mis en relation directe avec la zone de défense de Paris. A l’arrivée à la tête de cette dernière de la Préfète Michelle Merli, j’allais trouver une alliée efficace, prenant à son compte l’opération qui allait bien au-delà de la seule RATP, puisque concernant aussi bien la distribution de l’énergie électrique que les télécoms ou (surtout) la santé car il faudrait en effet déplacer plusieurs milliers de lits d’hôpital si la crue n’était pas maîtrisée.

Du côté de la RATP, avec l’arrivée à la présidence de Jean-Paul Bailly, j’avais obtenu tout son soutien. Un jour d’été, en période calme, alors que je lui indiquais où nous en étions avec la SNCF qui nous avait immédiatement suivis dans la démarche, il m’avoua avoir soutenu en confiance mes propositions sans avoir eu le temps de regarder à fond le problème. C’était juste au moment de la crue de l’Elbe à Dresde et le parallèle que j’eus ainsi l’occasion de faire entre les deux situations acheva de le convaincre.

A quelque temps de là, la crue d’été de la Moldau à Prague allait montrer la fragilité à l’eau de nos réseaux de métro puisque 5 à 6 km de tunnel furent envahis en quelques heures et il fallut huit mois pour les remettre en service en épuisant toutes les réserves disponibles en Europe Occidentale pour ce qui concerne les câbles sans halogène prescrits dans le cadre de la prévention contre l’incendie dans les espaces souterrains.

La principale objection qui m’avait été faite, au départ, était la présence de barrages de retenue en amont de Paris. Certes, ils existent bien depuis les années trente, par contre leur fonction n’est pas de réguler les crues mais au contraire d’assurer l’étiage en saison sèche. Un débit minimal de 100 m3/s est en effet nécessaire. Lors de l’été 1924, on traversait la Seine à pied dans Paris … D’où la construction de ces barrages dont on maintient le remplissage en permanence l’hiver pour pouvoir lâcher l’eau l’été.

Depuis, les matériaux nécessaires à l’édification des protections sont stockés et les réquisitions préparées. Un plan « crue » a été établi et des exercices réguliers sont effectués avec tous les acteurs concernés (APHP, EDF,GDF, France Télécom, SNCF, RATP etc.) afin de s’assurer que les plans de prévention et d’intervention sont bien tenus à jour.